on danse?

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dalailéna
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Message31 Août 2008, 00:37

alors, suite au sujet lancé par astro dans les bains publics sur les olympiades médievales, ou il disait que la danse n'est pas histo puisque interdite par l'église, la question se pose: danse t-on historique???  
moi je dis que oui parce que j'aime bien les carlamusa (c'est pas une preuve le "j'aime bien") et pour ca:
http://chapiteaux.free.fr/TXT_danses.html
http://storage.canalblog.com/26/06/431609/40084212_m.jpg

guglielmo
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Message25 Mars 2010, 10:46

la danse n'est pas histo puisque interdite par l'église^



Oui et non. De tous temps (tout au moins pour la période qui nous occupe) l'Eglise a tenté d'interdire la danse. Mais il s'agit de bien définir ce qui était interdit.

Il s'agit surtout de la danse dans les lieux consacrés, sur les parvis d'église et comme élément profane dans les processions, par exemple.

Pourtant, cette interdiction est relativement mal suivie, si on en juge par le nombre de bulles papales la rappelant. Par ailleurs, à Monsterrat, les moines vont encadrer la danse plutôt que l'interdire, en proposant des chants "a ball redon" (danse en rond. Sur les dix partitions qui nous sont parvenues, quatre le sont (Stella spelendens, Cuncti simus, Los set gotx, Polorum regina) et une cinquième (Ad mortem) concerne ce qui est regardé comme une des ancètres des danses macabres
.
Si on se base sur l'iconographie, la danse est bien présente dans la société médiévale, au moins depuis le Xe siècle (puisque c'est de cette époque que datent les plus anciennes gravures). Leur nombre n'ira qu'en augmentant et ce, dans tous les contextes.

Quant à savoir si ce qu'on danse est historique... voilà un grand débat qui s'ouvre...

Pour faire bref, il faut d'aborddistinguer deux périodes: avant le XVe et à partir du XVe.

Avant le XVe, on ne dispose d'aucun écrit, d'aucune descrïption de pas. Uniquement l'iconographie peut aider à reconstituer des attitudes puisque, par définition, une gravure est une photographie d'un moment arrêté. La mise en succession de plusieurs moments permet de reconstituer un mouvement. Mais cette reconstitution sera subjective car dictée par le vécu de celui qui l'imagine. Ainsi, sur une même mélodie, divers mouvements dansés pourront être créés. C'est ce qui fait l'intérêt de rencontres comme celles de Largentière où on peut comparer et discuter des options choisies.

Avec le XVe arrive, en Italie, la descrïption de chorégraphies mais non de pas (ou si peu). Les princes italiens, déjà "entrés en Renaissance" engagent des "maîtres à danser" qui imaginent non seulement les danses mais les chorégraphies de cérémonies, l'ordonnancement des réceptions,... Les trois premiers connus sont Domenico da Piacenza, Guglielmo Ebreo (devenu Giovanni Ambrogio) et Antonio Cornazzano. Rien n'interdit de considérer que ces danses furent pratiquées, notamment, à la Cour de Bourgogne (et sans doute aussi à celle du Roi René).

A la fin du XVe, paraissent des traités relatifs à un type de danses: les basses-danses. Nous avons ainsi le Ms Brussels 9085 (Manuscrit des basses-danses de Marguerite d'Autriche) et "l'Art et instruction de bien dancer" de Michel Toulouse. Ces documents ne décrivent que le déroulement des danses (succession des pas) sans donner beaucoup de précisions concernant les pas.

Il faudra donc attendre la parution de l'Orchésographie d'Arbeau, à la fin du XVIe pour disposer d'un ouvrage décrivant les pas par le menu. Ce qui explique sans doute son (trop) grand succès actuel dans l'ensemble des troupes médiévales.

En conclusion, oui, danser fait partie du quotidien (ou presque) tant du peuple que des dominants (au début XVe, la danse fait partie intégrante de l'éducation des enfants de la noblesse) et, non, danser Arbeau n'est pas trop acceptable, même si, je le concède volontiers, c'est nettement plus facile. Tout au plus, peut-on regarder les branles doubles et simples comme des survivances de danses plus anciennes, notamment par leur forme en cercle. Quant aux pas...???
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guglielmo
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Message25 Mars 2010, 17:40

Pour être vraiment complet, je me dois de vous préciser que, céans, il est une troupe qui réalise un énorme travail de restitution de danses: il s'agit de Morescarole. Ca et là, j'ai vu que plusieurs participants du forum ont eu affaire à Catherine et à sa troupe et en furent enchantés.

Pour ma part, au lendemain du stage de Simiane, je fais partie de ceux qui en redemandent.

--Message edité par guglielmo le 2010-03-25 18:40:55--
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Frère Basile
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Message25 Mars 2010, 20:41

Bien, voilà une réponse magistrale et bien documentée.

Simplement je crois que le mécanisme intellectuel est intéressant:

Justement, si l'église l'interdit à plusieurs reprises, c'est que la danse se pratique!!

Plus globalement l'iconographie est très riche en scènes de danses, donc pas de doute là dessus.

La vrai question est comment dansait-on à l'époque et cela reste un sujet qui fera couler de l'encre.

Pour ceux que cela intéresse les rencontres de lutherie et musique médiévales de Largentière cet été seront un début de réflexion sur le sujet, avec tables rondes, conférences et mise en pratique (un bal tout les soirs).
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Message30 Mars 2010, 11:45

Frère Basile a dit :

Justement, si l'église l'interdit à plusieurs reprises, c'est que la danse se pratique!!



Cela tu peux en être sûr, cher Basile. C'est ainsi qu'on raisonne en Histoire pour faire de l'histoire sociale surtout. J'ai vu ça avec les pratiques conjugales, les pénitenciels sont une liste d'interdits et permettent de savoir ce qui se pratiquait donc ! Donc en effet si certaines formes de danses ont été interdites par l'Eglises c'est qu'elles étaient pratiquées voire même (supposition) que c'étaient les plus pratiquées puisque que l'Eglise a pris la peine de l'interdire.
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Damienus
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Message31 Mars 2010, 14:58

Malgwen , ménestrelle a dit : C'est ainsi qu'on raisonne en Histoire pour faire de l'histoire sociale surtout. J'ai vu ça avec les pratiques conjugales, les pénitenciels sont une liste d'interdits et permettent de savoir ce qui se pratiquait donc ! Donc en effet si certaines formes de danses ont été interdites par l'Eglises c'est qu'elles étaient pratiquées voire même (supposition) que c'étaient les plus pratiquées puisque que l'Eglise a pris la peine de l'interdire.



C'est bien t'aura une bonne note au partiel
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Malgwen , ménestrelle
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Message13 Avr 2010, 10:34

Vive Paul Payan
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Message15 Avr 2010, 21:01

si certaines formes de danses ont été interdites par l'Eglise



Elles l'ont été, pas de doute là-dessus. Comme le seront, lors de la Contre-Réforme (tout au moins dans les Pays-Bas espagnols), tous les éléments profanes intervenant dans les cérémonies religieuses, essentiellement les processions. Ainsi en fut-il des danses d'épée.

La vrai question est comment dansait-on à l'époque et cela reste un sujet qui fera couler de l'encre



On pourrait tenter d'émettre des hypothèses sur base du type de mélodie et encore... Car s'aventurer sur ce terrain, c'est grimper une falaise avec une seule jambe et une seule main... On risque fort de dévisser grave.

Ce serait un réel non-sens de décider que les danses lentes, calmes, élaborées étaient seules dansées chez les dominants... Et pourtant, sur ce point, on peut sans doute décider que les basses-danses étaient des danses de cour et ce, à la lumière de quelques indices:
1°) ces danses sont lentes et majestueuses. Indéniablement, celui qui y participe est mis en avant, en valeur. Mais cet argument est insuffisant. Voyons donc plus loin.
2°) la basse-danse aura son heure de gloire notamment en Bourgogne (depuis Dijon jusqu'à Antwerpen-Anvers). Or, que constate-t-on sur le plan des costumes, surtout féminins: des robes lourdes, à traine, des coiffures assez incroyables (les hennins de diverses formes et encombrements tout aussi divers). Il apparaît assez invraisemblable (et c'est ce que nous tentons de montrer au sein de la Compagnie) de pouvoir danser avec ces affutiaux des danses enlevées, courues, sautées,...

Ceci ne vaut que pour les basses-danses auxquelles pourraient s'ajouter celles qui furent l'objet de publication au XVe siècle. Mais nous sommes là la fin du Moyen-Age.

Que dire pour les périodes antérieures ? Catherine Ingrassia, de Morescarole a mené une étude exhaustive sur les représentations de danse dans l'iconographie médiévale. Elle nous donne un certain nombre d'indications:
"Au XVe siècle, les pratiques de danses populaires sont très mal considérées par la haute société. A cette époque apparaît l'opposition hautes danses et basses danses ou danses planes."

Si on applique à ceci le raisonnement utilisé pour l'interdiction de l'Eglise, on peut considérer qu'avant le XVe la césure entre classes sociales est moins nette, voire inexistante. Et là je serais tenté de faire un parallèle avec les réjouissances dansées en Angleterre où, tard dans le millénaire (notamment dans les contredanses du XVIIIe) on voit évoluer ensemble la noblesse et ses obligés).

Par ailleurs, lorsqu'on interroge l'iconographie, on doit se poser certaines questions:
1°) dans quel contexte l'image est-elle réalisée ?
2°) que peut-on savoir des intentions du peintre, de l'enlumineur, du dessinateur ?
3°) est-il vraisemblable d'y lire un message ?

Sur ce dernier point, par exemple, considérons une gravure comme celle de l'arbre de mai "L"annonce faite au berger" tirée du Ms 1172 conservé à Paris (couverture de "La danse médiévale" de C. Ingrassia, C. Deslignes et X. Terrasa). Nous y voyons un groupe de bergers danser de manière désordonnée (les pas ne sont pas identiques, les attitudes non plus et sont même un peu contradictoires).

Or, dans les gravures montrant les dominants occupés à danser, ceux-ci ont des attitudes hiératiques, policées, bien ensemble...

La question à se poser n'est-elle pas la suivante: si nous voyons ces gravures sous l'angle de la propagande, ne peut-on considérer qu'elles légitiment l'ordre par rapport au désordre ? Et donc justifier le fait que les dominants ont le pouvoir, vu qu'ils savent adopter une discipline collective que n'ont pas les dominés ?
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