Bonjour à tous !
Je suis ravi de pouvoir à nouveau poster sur le forum. Certains me reconnaîtront et d'autres qui me connaissent moins me prendront probablement pour un fou... Mais cependant je me dois d'éclaircir certaines choses sur ce post passionnant.
Beaucoup d'entre vous parlent de "culture cathare", de "religion cathare", "si les cathares avaient gagné", "Albigeois et Cathares", etc, etc. Il s'agit, pour être direct, de notions à la fois erronées, anachroniques et purement fantaisistes.
C'est à travers des théories plus que douteuses et ne s'appuyant que sur une seule et même historiographie que des très bons historiens avancent ces théories. Pour les citer, car vous les avez mentionnés, il s'agit de Michel Roquebert, Anne Brenon ou encore Jean Duvernoy. Il s'agit certes d'historiens et de chercheurs respectés pour certaines de leurs études, mais dans la communauté historique, ils ne jouissent plus d'aucune crédibilité en ce qui concerne la culture dite cathare.
Pour appuyer ceci, je vous invite à prendre en compte leur bibliographie :
_ Michel Roquebert pour le citer en premier prend en compte le principe de religion et d'organisation d'une Eglise cathare. La religion cathare, 2001; l'épopée cathare 1970 et 1998, mais plus grave encore : Les cathares et le Graal 1994 (roman historique) ou [i)Citadelle du vertige[/i] 1966. Je tiens aussi à faire remarquer que certains ouvrages sont aussi anciens que certains de Georges Duby.
_ Anne Brenon est l'historienne qui est peut être la plus dangereuse dans ses ouvrages. En effet, elle va jusqu'à s'appuyer sur ses propres fictions "historiques" pour argumenter ses théories. Les fils du malheur de 2002 ou encore L'impénitente de 2001. Mais à prendre en compte également : Les cathares, une Eglise chrétienne au bûcher 1998, Les archipels cathares, dissidences chrétienne en Europe en 2000, Les cathares de 2001, Peire Autier le dernier des cathares. Je continue afin de vous montrer que les sujets se suivent et se ressemblent : Le vrai visage du catharisme, Les cathares, pauvres du Christ ou apôtres de Satan, Petit précis de catharisme, et je m'arrête là pour les livres, mais elle est aussi passée par les DVD touristiques.
Cet ensemble de « livres » sur les « cathares » doit pouvoir vous montrer comment, à travers des livres accessibles au public le plus large, ces historiens divulguent leur message et ceci uniquement dans le but de vendre et de faire de l’argent. Car le sujet « cathare » se vend ! Outre les livres, je vous présente à présent la fabuleuse machine consommatrice.
Depuis l’autoroute : « vous entrez en pays cathare », jusqu’au supermarché de Carcassonne où vous pourrez vous procurer du « lait cathare », en passant par la cité haute où vous pourrez déguster entre deux magasins une fabuleuse « bière cathare, » la machine touristique est belle et bien en marche. C’est à travers une identité tout simplement inventée que le projet « pays cathare » s’est mis en place, appuyé par ces historiens qui multiplient les ouvrages pour le plus grand bonheur des touristes.
C’est un aspect très dangereux que je mets en avant. En effet, cette identité s’implante, est très présente, les gens y tiennent et y croient. Et même jusqu’au cœur de certains d’entre nous qui revendiquent la reconstitution la plus pointue. Notre aspect d’évocation et de reconstitution historique est prit très au sérieux par le public. Ce que nous pouvons divulguer, présenter au public entrera dans les mémoires et contribue ainsi au message erroné.
Je parlerai enfin de guide, réels, physiques, qui pour ne pas choquer et ne pas se mouiller ne font pas mention pour un sou de cet aspect historique qu’est l’hérésie en Languedoc. Afin de me justifier, je présente simplement le magnifique site de l’abbaye cistercienne de Fontfroide. L’aspect historique de l’abbaye est mis de côté au profit de l’aspect économique et artistique. Bien que se soit des aspects importants et tout aussi passionnants, le connaisseur et l’amateur restent sur le carreau en repartant sans rien savoir de plus. Pourtant je tiens fermement à montrer que l’abbaye joue un rôle de premier plan lors de la croisade de 1209, et puis quant même, certains moines sont très importants, comme Jacques Fournier, devenu pape sous le nom de Benoît XII et qui était de Fontfroide. Mais les méchants cisterciens luttant contre les gentils cathares sont sources de contre-business, et l’ont joue à la fois la carte de la non-information mais aussi la carte de la désinformation, ce qui est d’autant plus grave.
Le débat qui fait rage parmi la communauté scientifique va très loin, jusqu’à de réelles insultes qui ont bien faillis être réglées au tribunal juridique. Il s’agit d’un côté de montrer que le catharisme est réel, organisé, unifié et dogmatisé. D’un autre côté, il s’agit, pour faire simple, de montrer que les mouvements hérétiques du Languedoc et du sud de la France ne sont pas unifiés, ni dogmatisés et s’inscrivent dans un contexte historique, politique et religieux particulier. Cette historiographie dont j’ai parlé plus haut met en avant trois mouvements historiques : les positivistes qui prenaient pour argent content les sources (mouvement historique repensé depuis car ancien), ceux qui prônent ce que j’ai présenté jusqu’à présent et enfin ceux qui inscrivent les mouvements hérétiques, que l’on nomme par facilité et, hélas, habitude les cathares, dans un aspect créé par l’institution ecclésiale.
Ceci dit, j’en viens maintenant à présenter le travail actuel d’historiens, pris extrêmement au sérieux parmi la communauté scientifique. Je vais faire un amalgame des différentes théories à travers Monique Zerner, Jean-Pierre Weiss, Michel Lauwers, Jean-Louis Biget, Guy Lobrichon, Paul Payan ou encore Simone Balossino pour ne citer que ceux qui me viennent maintenant à l’esprit. Il ne s’agit pas là encore de citer leur bibliographie, mais de montrer les travaux actuels, récents qui prouvent une nouvelle vision de la pensée historique.
Il s’agit de prendre en compte les sources mises à disposition, nombreuses et en excellent état de conservation.
A commencer par l’appellation même. Les hérétiques entre eux ne se sont jamais identifiés comme « cathares ». Entre eux ils sont les bons hommes, jusqu’aux écrits de l’inquisition. Ce premier raisonnement permet de clore le discours d’une communauté unie. Il s’agit d’un ensemble de dissidents, non organisés, croyants certes, mais non dogmatisés. C’est l’Eglise elle-même qui amène à croire en une communauté unie. Je vous rappelle que l’Eglise catholique s’organise à l’époque où nous parlons, à savoir le XIIème et XIIIème siècle. Depuis le concile de Nicée en 325 et celui de Chalcédoine de 451, le dogme de l’Eglise est précisé et les hérésies de l’époque connues et cataloguées. Après la réforme dite grégorienne, l’Eglise cherche à se défaire de l’emprise aristocratique et à s’imposer comme une puissance à la fois temporelle et spirituelle. Le fait « simple » de définir une croyance, organiser un culte, appuyer son culte par des écrits, implique de faire le tri parmi ces derniers, de définir très précisément ce qui est autorisé et non et donc par conséquent de définir une hérésie. Le but bien entendu de cette réelle politique est de s’émanciper, de convaincre des fidèles et s’implanter le plus possible. Pensons bien entendu aux croisades, but bien défini de reprendre une ville considérée comme sainte, la délivrer d’infidèles.
Je vous montre par là que l’Eglise elle-même défini l’hérésie et par là même le mouvement dit « cathare ». Elle est à l’origine de la plupart des textes du Moyen-Âge. Alors que les premiers historiens dont j’ai parlé s’appuis sur ces textes, les prenant pour argent comptant, le second groupe d’historien s’intéresse tant à l’analyse même du document, qu’à sa stylistique, sa nature, son support, son écriture (analyse que l’on appelle codicolique), mais également le contexte historique qui tourne autour de la construction du document, l’historiographie du document et l’histoire de ses auteurs. Le premier groupe d’historien s’appui également sur des textes qui malheureusement n’ont jamais fait l’objet d’étude complète et sérieuse : je parle ici de « la bible des cathares », le livre sur les deux principes. Ils s’appuis aussi sur un faux (bien que la polémique n’est pas terminée) qui situ un concile hérétique fixant et délimitant l’Eglise « cathare ». Mais quelqu’un d’autre sur ce forum, qui se reconnaîtra, sera plus à même d’en parler.
Je pourrai continuer bien sûr en parlant des châteaux dits cathares, qui font couler beaucoup d’encre et font l’objet de sujets aussi fantasques que grotesques. Ces forteresses étaient là bien avant la naissance des mouvements hérétiques. Pensez que la région est sources de disputes incessantes, frontières des royaumes, de comtés et de terres.
Je ne me considère pas comme quelqu’un possédant la science infuse. C’est un aspect nouveau et tout simplement ignoré du public. La cause ? Il s’agit de colloques, de séminaires et de tables rondes (les nouveaux « regards croisés » tant appréciés des universitaires) qui recherchent d’abord la justification, l’argumentation et la connaissance. La bibliographie est importante, immense, mais sous la forme d’actes de colloques, de publication de thèses ou de maîtrises, d’ouvrages qui malheureusement ne sont pas à la portée de n’importe quelle bibliothèque. Par contre, lorsqu’il s’agit d’ouvrages de vulgarisation, de tourisme, n’importe quel établissement culturel se charge de renflouer ses rayons. Mais bien sûr, je vous invite à faire vous-même des recherches sur les historiens que j’ai mentionné dans le second groupe. Qui reprennent l’historiographie, travaillent sur la comparaison, l’argumentation et la démonstration de faits, tout en ne s’éloignant pas de la problématique initiale de leur conversation.
Ceci étant dit, j'espère pouvoir de nouveau me connecter et revenir sur le forum.
Ce pavé est maintenant terminé, n'engage que moi et ceux qui s'inscrivent dans ce mouvement.
A bientôt !!
Fr. Firmin.