24 Juil 2011, 15:49
d'aprés Maître chicart:
Alcool : histoire de la distillation
Distillation des huiles aromatiques pour la parfumerie dans l'Antiquité, distillation de l'eau de vie au Moyen-Age, alcool de consommation à partir du 15e siècle.
1 - Antiquité
Nous sommes vraisemblablement dans le domaine de la distillation des huiles aromatiques et de la parfumerie, mais pas encore dans le domaine de la distillation de l'alcool.
Des vases (dont l'un de 37 l avec une collerette de 2 l), considérés par les archéologues comme des alambics primitifs, ont été trouvés dans le nord de l'Irak (Tepe Gawra, Mésopotamie). Ils sont datés de - 3500 ans.
Il semble que ces techniques de distillation aient été également connues des civilisations de l'Indus au 3e millénaire avant J.C. (fouilles de Mohenjo Daro).
On a trouvé, dans les fouilles de Kéos, - 16e siècle (Crète), une tablette représentant un vase, posé sur un feu et surmonté d'un couvercle en cône, qui pourrait également être un alambic primitif. Le mot grec ambikos, désignant un vase cylindro-tronconique, est à l'origine du mot arabe alambic.
Aristote (philosophe grec, - 384 à - 322) a décrit le premier le principe de la distillation de l'eau de mer.
Dans la ville d'Alexandrie (Egypte), dans les premiers siècles avant et après J.C., on trouve une importante corporation de parfumeurs, possédant des alambics (ambikos) pour distiller des élixirs, des essences florales. Ces anonymes seraient à l'origine de la chimie et de l'alchimie. Un manuscrit du 4e siècle, écrit par un alchimiste alexandrin Zosime de Panopolis, présenterait une illustration d'un alambic.
Une légende attribue à St Patrick, moine irlandais, un passage en Egypte vers 420 et l'importation de l'alambic en Irlande. Il serait ainsi à l'origine de la fabrication du whisky irlandais (uisce beatha, eau bénite) !
Pour Liliane Plouvier, historienne de Bruxelles, spécialisée dans l'histoire de l'alimentation et de la confiserie en Europe, il semblerait que l'Antiquité connaisse bien la distillation hydraulique mais pas l'alambic qui permet la distillation de l'alcool. Il est en effet relativement simple de récupérer de la vapeur d'eau qui se condense sur le couvercle d'un récipient. Ensuite, par simple décantation on récupère de petites quantités d'huiles que contenait une décoction de plantes aromatiques, pour les utiliser en parfumerie. En revanche, pour obtenir de l'alcool en quantité suffisante, il faut refroidir rapidement les vapeurs d'alcool avec de l'eau froide (technique du serpentin). Et ce procédé n'a été inventé, semble-t-il, qu'au Moyen Age.
2 - Moyen Age
Nous sommes dans le domaine de la médecine et de l'alchimie : on fabrique des "élixirs de longue vie ou eau de vie".
Liliane Plouvier distingue donc la distillation hydraulique et la distillation alcoolique. Elle explique, dans Les origines de l'art distillatoire, que les alchimistes arabes et perses, à la recherche de la pierre philosophale, s'intéressent à la distillation et mettent au point l'alambic. En résumé, elle indique 2 médecins arabes qui ont fait progresser le procédé de distillation de l'alcool :
Al-Kindi (médecin-alchimiste de Bagdad mort en 873) fabrique des essences de rose.
Abulcasis (médecin-chirurgien de Cordoue, 936-1031) perfectionne l'alambic et distille aussi bien de l'eau de rose que du vin lequel donne la fameuse "aqua vitae", l'eau de vie censée procurer l'immortalité.
A partir du 12e siècle, les occidentaux développent cette technique. Mais l'alcool obtenu est alors majoritairement un médicament réservé aux médecins et aux apothicaires.
Il a été dit que les abbayes irlandaises distillaient déjà l'eau bénite (uisce beatha) en 1170 quand les soldats d'Henri II d'Angleterre envahirent l'Irlande. Les alambics irlandais auraient déjà été taxés en 1276 par les anglais, d'après Maguelonne Toussaint-Samat (Histoire naturelle et morale de la nourriture).
Jean de Meung, dans la deuxième partie du Roman de la Rose écrite vers 1270, dit : je vois maintes fois que tu plores cum alambic sus alutel.
Arnau de Vilanova, dit Arnaud de Villeneuve (médecin catalan de l'université de Montpellier, mort en 1311) cite dans le De vinis (Le Livre des vins, éditions de la Merci, 2011) l'aqua ardens (eau ardente) et donne des recettes de macération de plantes et d'alcool. Il est le premier à pratiquer le mutage à l'alcool (procédé arabe semble-t-il) pour améliorer la conservation du vin. Les templiers du Mas Deu de Perpignan généralisent ensuite le procédé. D'où le développement de vins doux naturels dans la région.
et enfin:
Quelques origines linguistiques
Alambic : 1265, vient de l'espagnol alambico, qui vient de l'arabe al inbiq = vase à distiller, qui vient du grec ambix.
Elixir : 1265, de l'arabe al iksir = la pierre philosophale et le médicament, emprunté au grec, Kseron = médicament.
Eau de vie : 14e siècle, traduction du latin des alchimistes aqua vitae.
Alcool : 16e siècle, vient de al koh'l = nom arabe du sulfure d'antimoine